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Courtin Pierre
Né en 1921 à Rebréchien, un petit village forestier près d'Orléans. Décédé le 15 Septembre 2012.
Ses racines, intactes par delà ses fréquentations parisiennes (Jacques Villon, Dewasne, Herbin, Pevsner, Hartung), plongent dans le monde paysan. Ses débuts artistiques remontent à soixante années. Bien que depuis 1987 il n'est peu ou prou plus que peintre, il fut au premier chef, exclusivement, un graveur sans pareil – qui demeure en dehors de la notoriété et d'une classification professionnelle commode. Or Courtin a souvent exposé aux Etats-Unis, en Allemagne, en Suisse, en Belgique; il a eu Heinz Berggruen pour marchand à Paris de 1957 à 1969; il a participé à la Documenta de 1959 et à la Biennale de Venise en 1960. Son oeuvre gravé tourne autour des quatre cent cinquante pièces, multipliant presque toujours les états (Le silence du chien, aujourd'hui à la Bibliothèque nationale de France, en additionnera 161 entre 1975 et 1977 !), mais imprimés chacun à de rares épreuves qui privilégient l'autre sur le même.
Courtin va abandonner dès la fin des années 40 la définition habituelle qu'engendre une pointe triangulaire poussée dans le métal où elle lève des tranchées linéaires. A l'échoppe, la lame qui aborde à plat le zinc ou le cuivre, il pratique une espèce d'écobuage, diraient les laboureurs. Aux tailles croisées à la Dürer se substitue donc, pour configurer la surface, une organisation d'accidents de terrain, qui joue de légers abaissements et de raclages. On est plus dans l'étendue modulée que dans la profondeur. C'est une cartographie de bas-reliefs. S'il s'agissait d'orfèvrerie, on pourrait souvent parler d'un Courtin marteleur, plutôt que ciseleur. Son art est celui d'une gravure de champ (comme il existe une peinture de champ) – et de texture, aux détails accrochant la lumière. Mais gravure de champ ne signifie pas de grande étendue ni aux plages d'un seul tenant: la référence idéale reste les dimensions de la paume de la main, et ses subdivisions.
On indiquera à raison que la technique de Courtin plonge ses racines dans le grand burin français du XVIIe siècle (Masson, Mellan, Nanteuil), que l'artiste a regardé Sumer et Mantegna, qu'il a admiré, dans la décade encore post-cubiste de sa formation, Picasso et quelques aînés (avant de leur donner congé, bien sûr), qu'il s'est d'abord formé à la xylographie, que par une certaine grammaire il se sent proche des Africains (et non des Aztèques, à notre surprise). Cela éclaire-t-il sa gravure ? Désignations descriptives et titres savoureux et spirituels peuvent sans doute s'y associer, mais se tiennent en fait à distance, indifférents. Alors comment dire, faire voir ? En suggérant natures mortes, cités, campagnes, personnages ? Sans doute pas.
Pierre Courtin, le sillon du graveur
Durée: 12'30"
Année édition module:1999